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Voitures électriques : Berlin rejoint Carlos Tavares sur un éventuel cheval de Troie chinois



Après l'alerte lancée par le président de PSA Carlos Tavares, Berlin relaye l'inquiétude sur une mainmise asiatique. Le risque de la voiture électrique: que la filière soit stratégiquement dominée par les Chinois. Pékin tisse sa toile à coup de subventions publiques en séduisant des Européens parfois naïfs.

Berlin rejoint Carlos Tavares dans son inquiétude stratégique. Le passage à la voiture électrique ne va-t-il pas se faire au détriment de l'industrie européenne, en ouvrant une voie royale à une domination asiatique et notamment... chinoise? Les constructeurs allemands ont besoin d'investir des "montants à deux chiffres en milliards d'euros" dans les voitures électriques, affirme le ministre de l'Economie allemand, Peter Altmaier, dans une interview au Bild publiée ce lundi. Il faut également investir dans la production de batteries, au vu des prévisions d'une demande qui serait de plusieurs millions d'unités, poursuit-il. "Sinon, il nous faudra nous faire à l'idée qu'une grande partie de la valeur ajoutée soit produite en Asie ou aux Etats-Unis, au lieu de l'être chez nous", précise Peter Altmaier.

Un cri d'alerte sur l'indépendance stratégique

Le 28 mars dernier, Carlos Tavares, président de PSA, avait pointé du doigt, lors d'une audition devant l'Assemblée nationale, la dépendance de l'Europe "vis-à-vis des fabricants de batteries essentiellement asiatiques, et notamment chinois". Le dirigeant avait plaidé en faveur d'une "étude d'impact à 360 degrés, du puits à la roue, de la production d'énergie, de l'empreinte carbone de l'extraction des matériaux rares, de la fabrication et du recyclage des batteries". Il souhaitait aussi que cette étude de fond prenne en compte "le problème géostratégique de la localisation des matières rares". Il ajoutait: "il faudra s'assurer d'un libre accès à un prix compétitif du Kilowatt-heure".

Dans le secteur automobile, le boom de la voiture électrique rebat les cartes. Le 13 décembre dernier, le japonais Toyota annonçait un projet de collaboration avec son compatriote Panasonic pour développer des batteries lithium-ion de nouvelle génération. Ce rapprochement accentuait l'emprise des Asiatiques sur le segment des batteries, élément qui représente un tiers du prix d'un véhicule électrique. Sur ce marché, outre Panasonic, on retrouve les japonais Nissan et NEC, les coréens Samsung et LG, et surtout une myriade de chinois (CATL, BYD, Lishen, Wanxiang, BAIC, ...). Très agressives, ces entreprises ont fait une razzia sur la concurrence. Aujourd'hui, les Etats- Unis ne pèsent plus grand-chose, quoi qu'en dise le ministre allemand. En Europe, seuls l'allemand BMZ et les français Saft (repris par Total) et Bolloré (sur la technologie lithium métal polymère) résistent encore!

Filières subventionnées par la Chine

Pour la Chine communiste, la voiture électrique est un secteur stratégique. Elle permet certes de dépolluer les villes mais aussi - surtout? - de préempter, via les batteries, un marché naissant afin de disposer d'un avantage compétitif, comme c'est le cas pour les panneaux solaires. Aujourd'hui, le pays est le champion de la mobilité zéro émission. Il détient le quasi-monopole du marché des bus électriques, avec en particulier les industriels Yutong et BYD qui dominent le marché. Sur les quelque 120.000 bus électriques vendus dans le monde l'an dernier, 95% l'ont été en Chine. Du coup, forts des aides gouvernementales reçues dans l'ex-empire du Milieu et des économies d'échelle enregistrées, Yutong et BYD se retrouvent aux premières loges pour répondre aux desiderata européens. Mieux, pour amadouer les clients, BYD a même annoncé le 23 mars un mini-investissement de 10 millions d'euros à Allonne (Oise) pour assembler des bus zéro émission à partir de composants intégralement importés de Chine. Conformément à la politique de Pékin. Quant à Yutong, il s'est associé au français Dietrich Carebus Group. La filière propose ses bus à prix cassés en Europe...

"La moitié des capacités mondiales des batteries se trouvent en Chine, et bientôt ce sera les deux tiers", constate Laurent Petizon, analyste au cabinet Alix Partners. Il n'en sera certes peut-être pas toujours ainsi. La batterie est un produit lourd (au moins 200 kilogrammes) et, pour des raisons de sécurité, intransportable en avion. Les fournisseurs ont donc intérêt à la produire au plus près des marchés, ce qui permet aussi d'éviter les droits de douane. LG implante en ce moment une usine en Pologne, et Samsung en Hongrie. Quant à l'américain Tesla, premier constructeur mondial, il établit sa Gigafactory dans le Nevada. Mais avec des batteries Panasonic. Cependant, même avec des batteries produites en Occident, qu'en sera-t-il demain de la technologie?

Les voitures électriques ne représentent certes que 1% des immatriculations. Mais l'Europe n'a-t-elle pas déjà perdu la bataille du lithium-ion, alors que les pouvoir publics ne jurent que par la voiture électrique parée de toutes les vertus politco-écologiques ? Inquiétant, alors que les constructeurs chinois eux-mêmes sont à l'offensive dans l'industrie automobile européenne. Après l'achat de Volvo Cars (voitures) en 2010, la prise d'une forte participation en décembre 2017 dans les camions d'AB Volvo (qui détient Renault Trucks) avec 15,6% des droits de vote, le milliardaire Li Shufu de Geely vient, sans coup férir, de devenir le premier actionnaire de l'allemand Daimler avec 9,69% du capital! Le groupe d'Etat chinois Dongfeng est par ailleurs actionnaire dé référence de... PSA depuis 2014. Alerte à la mainmise chinoise.

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