En marge de notre visite de l’usine PSA de Rennes, nous avons eu l’occasion de rencontrer Linda Jackson, directrice de la marque Citroën, ainsi qu’Arnaud Belloni, son directeur marketing. L’occasion de vous rapporter quelques bribes de conversation éclairantes quant au futur de la marque Citroën !
Comment progressent les ventes de Citroën ?
Alors que la nouvelle identité Citroën est maintenant déployée sur les véhicules de la gamme depuis plusieurs mois, il convient de tirer un premier bilan des performances commerciales. Arnaud Belloni s’appuie ainsi sur les chiffres de vente Citroën au premier semestre 2018 : croissance mondiale des ventes de 9 %, meilleure performance en Europe depuis 7 ans en progression de 7,4 % sont ainsi des preuves de la bonne santé de Citroën. Le best-seller de la marque qu’est la C3 est sur un rythme de 20.000 commandes par mois dans le monde, et 63.000 ventes ont été réalisées en Chine sur le premier semestre, ce qui constitue une progression d’environ 50 %. Enfin, le C5 Aircross, commercialisé depuis l’automne 2017 dans l’Empire du Milieu, y totalisait déjà 40.000 ventes en juillet 2018.
Y a-t-il des signaux indiquant une évolution positive de l’image de marque Citroën ?
Linda Jackson : Je pense que la réponse est oui, mais ce qu’il faut voir pour moi, ce ne sont pas tant les sondages, mais les ventes. Parce que si le nouveau positionnement ne fonctionne pas, alors deux choses se passeront : d’une, il n’y aura pas de croissance des ventes, et de deux le mix, corrélé à la valeur de vente, ne sera pas bon. Si nous prenons nos lancements récents, C3 et C3 Aircross, le niveau 3 représente environ 55 % de nos volumes, et le niveau 2 environ 40 %. La valeur résiduelle s’améliore aussi sur tous nos modèles. On voit donc une amélioration en se basant sur des choses réelles.
Arnaud Belloni : Tous ces éléments sont visibles de par leur contribution au résultat financier de l’entreprise. Quand avant on vendait des versions d’entrée de gamme, maintenant on vend des version 2 et 3. On ne vendait pas de bicolore, maintenant on en vend. Idem pour les Airbump. On a donc créé collectivement de la valeur. Deuxième élément qui me semble assez important : on commence à avoir des informations assez précises sur le rajeunissement de la marque. On a gagné pratiquement 9 ans sur C3. C’est assez impressionnant, et c’est constitutif d’un tout. Ce n’est pas que de la pub, c’est aussi une histoire de dessin de la voiture, de bicolore. Sur l’ancienne C3, on était au-delà des 60 ans. On est passés largement en-dessous des 55 ans. On n’avait pas ce problème sur le C4 Pic’ qui était déjà très bien. On devrait avoir le même type de résultats sur C3 Aircross, et c’est assez intéressant, car il constitue la deuxième nouveauté majeure avec la C3 depuis le redressement de la marque. Un troisième opus arrive avec C5 Aircross, et je pense qu’il va nous aider aussi à rajeunir la clientèle. Il y a aussi un truc assez important et assez nouveau, c’est que l’on a des outils de listening des réseaux sociaux dans le monde entier qui sont assez sophistiqués. Ils nous permettent de vérifier, en plus des méthodes ingénierie, que nous sommes la marque référence en termes de confort. Nous trackons ainsi la rumeur sur le confort. On étudie ainsi l’anglais, l’allemand, le français, l’italien et l’espagnol, et on est numéro un sur 4 des 5 langues. On monitore ces chose-là, et on a une perception très concrète de l’effet du programme Citroën Advanced Comfort. En l’occurrence, le fait d’avoir lancé C4 Cactus avec les suspensions à double butées hydrauliques, et qu’on ait fait un marketing autour de la thématique « Comfort is the new cool » a fonctionné. C’est surtout très prometteur pour l’arrivée de C5 Aircross, pour lequel on va continuer sur cette thématique, puisque le slogan de lancement de la voiture est « Comfort Class SUV ». Voilà pour les éléments contributeurs de la stratégie. « Les Echos » a publié un baromètre récent sur les marques préférées des français, et place Citroën à la deuxième place du podium toutes marques confondues juste derrière Michelin et devant les autres marques automobiles françaises. Cela veut dire qu’à l’approche du Mondial de l’Automobile, et du centenaire de Citroën, on va là où on a des choses à dire. On reste focus, comme dirait Didier Deschamps . Il y a encore beaucoup de trucs à faire, pour vendre 1,6 million de voitures en 2020, donc il y a du boulot.
Linda Jackson : Il y aura une croissance grâce à une gamme jeune et cohérente, c’est la première chose. La deuxième chose, c’est un rebond en Chine que l’on a constaté au premier semestre. La troisième étape, c’est de nouvelles frontières. Sans l’Iran, où nous avons été contraints de suspendre nos activités entre temps. Mais il y a d’autres régions, d’autres opportunités.
Arnaud Belloni : On fera des avances un petit peu plus tard dans l’année pour ce qui va remplacer l’Iran. Il faut aussi noter qu’il y a 5-6 ans, quand on lançait un véhicule, on le commercialisait dans 5-6 pays. Aujourd’hui, on a des modèles comme le C5 Aircross commercialisés dans 93 pays. 88 pays pour le C3 Aircross, et 80 pour la C3.
Profitons de notre présence sur le site de production historique des grandes berlines de Citroën pour vous demander si nous avons espoir de retrouver une grande berline chez Citroën ?
Linda Jackson : Oui bien sûr. J’ai déjà dit qu’il faut être crédible. En tant que marque globale, il faut avoir une gamme qui couvre des petites voitures, des moyennes, des SUV et des grandes. On aura donc une grande berline pour Citroën. On en a besoin pour la Chine où ça reste un segment très important. Ce n’est pas la priorité aujourd’hui ; à l’heure actuelle c’est le SUV. Mais c’est dans le plan. Ça va arriver, même si ce ne sera pas demain. Et c’est pourquoi nous avons fait le concept CXperience au Mondial de Paris en 2016. C’était pour montrer ce que Citroën va faire. La réponse courte, c’est donc oui ! Mais il faudra attendre un petit peu.
Et la réponse longue du coup ?
Linda Jackson : La réponse longue, c’est oui ! Il faut attendre ! [Rires]
Arnaud Belloni : Enfin, pas très longtemps !
D’ailleurs, le CXperience n’était pas très « Airbumpé », mais au contraire assez lisse dans ses formes à l’extérieur. Est-ce que cela augure à terme d’une rupture stylistique franche entre vos gammes berline et SUV ?
Linda Jackson : Oui bien sûr ! Il y a toujours cette question sur les Airbumps. Mais il ne faut pas être prisonniers des Airbumps. Et c’est difficile de les imaginer sur un segment D flagship.
Arnaud Belloni : Ils seront différents…
Linda Jackson : Mais peut-être, peut-être… Pour moi, on a fait le concept CXperience qui incarne notre vision du segment D, sans les éléments traditionnels de la catégorie. Il n’y a pas de cuir. Il n’y a pas beaucoup de bois, ni de chrome, mais cela représente quand-même notre flagship. Évidemment que quand Citroën va faire sa grande berline – neo-sedan on pourrait dire – ce ne sera pas quelque chose de traditionnel. Ce sera disruptif.
Arnaud Belloni : Disruptif, mais qui va se vendre.
Linda Jackson : Bien sûr !
Arnaud Belloni : Parce qu’on peut réclamer des berlines haut de gamme, mais il y a des marques qui en ont lancées, qui ne se sont pas vendues, et les marques ont disparu. Donc ce qui est intéressant, c’est de ne pas réitérer les volumes de C6.
Linda Jackson : Les clés c’est un design unique, quelque chose d’un peu différent, et d’être une référence au niveau du confort.
Pas que pour la Chine, donc ?
Linda Jackson : Non, on ne fait plus de silhouettes que pour la Chine, que des silhouettes internationales.
Arnaud Belloni : C’est très important, et c’est ça le redéploiement mondial de la marque. Au moins 80 ou 90 pays de commercialisation pour un véhicule. Donc la réponse c’est oui, on va amener une grande berline. Il y aura même d’autres surprises… Et surtout, très important, quand on fait des concepts, ils finissent par sortir ! Chaque fois, depuis que Linda est là, en 2014 ! Réfléchissez à ce que je viens de vous dire, parce que vous allez en voir après, des concept-car…
Du coup, est-ce que je peux bientôt espérer voir un concept-car de grand monospace, remplaçant du C4 SpaceTourer ?
Linda Jackson : Pour ça, franchement il faut regarder le segment des monospaces. Ce qu’il se passe, c’est qu’il est en train de disparaître.
Du coup, plus d’offre pour un VP 7 places dans la gamme ?
Arnaud Belloni : On a une offre 7 places dans la gamme. Il faut qu’on réponde à ça, c’est important. On a le Grand C4 Picasso, 7 places. Euh pardon, SpaceTourer… Même moi je me fais avoir ! On a le nouveau Berlingo qui sort en 7 places, sur 2 tailles. Et le SpaceTourer, décliné en 3 tailles, et qui va de 7 à 9 places. On a même une variante plus simple, en 9 places, sur base de Jumpy pour des colonies de vacances par exemple. On a une vraie offre, et c’est extrêmement intéressant ce que vous dîtes, c’est tellement juste que l’année prochaine, je ferai un film publicitaire gamme disant qu’on a des 7 places. Ça me permet de valider mon intuition, merci !
Content d’aider le marketing Citroën !
Arnaud Belloni : Non mais je l’avais senti le truc ! Il y a une demande là-dessus. Par contre, la vérité des chiffres de vente et des segments, elle est implacable. Ça se reporte sur les SUV. Pour l’instant, on continue avec C4 SpaceTourer.
Linda Jackson : Quand on regarde les clients qui achetaient historiquement des monospaces, beaucoup ont maintenant décidé d’acheter un SUV. C’est pourquoi, avec le C5 Aircross, notre but était de faire un SUV à l’extérieur, et un MPV modulable à l’intérieur. Justement pour combiner le meilleur des deux mondes. Donc à mon avis, il y a beaucoup de gens qui vont continuer à basculer vers les SUV proposant les mêmes prestations de modularité qu’un monospace.
Arnaud Belloni : Et pour revenir sur le Grand C4 SpaceTourer : quand on l’a retravaillé fin 2016, on lui a mis tout ce qui manquait en technologie. Il est au niveau du C5 Aircross en ADAS. Il n’y a qu’une ADAS en moins. Il reste aussi une référence en matière de confort. Je pense qu’il peut aller au bout de sa carrière très facilement, il est très crédible, sa réputation est très bonne. Dans des comparatifs, vos confrères le font encore gagner face à des modèles sortis l’année dernière. Le Berlingo est presque au niveau du C5 Aircross aussi, avec une ADAS de moins.
Je vous invite à découvrir l'excellent reportage sur le site de The Automobilists sur la fabrication du C5 Aircross à Rennes
Source : https://theautomobilists.fr/2018/09/30/psa-rennes-visite-de-lusine-decouverte-du-c5-aircross-et-entretiens-avec-linda-jackson-et-arnaud-belloni/
de bonnes infos sur une grande berline