Citroën AMI 6
A la fin des années 1950, Citroën engage les recherches sur un nouveau véhicule dont l’objectif sera de combler l’écart, gigantesque, entre la DS et la 2Cv. Pour des raisons de coût, le projet AM, pour automobile milieu de gamme, fait l’impasse sur les technologies de la DS pour reprendre la plateforme de la 2CV.
La cahier des charges impose que la future Citroën soit confortable et ne doit pas dépasser une longueur de 4 mètres. Reprenant la base de la 2Cv, il est donc impossible aux ingénieurs d’étirer l’empattement qui se voit confronter à une autre demande, émanant du patron de Citroën Pierre Bercot. Ce dernier refuse que la future AMI6 soit un véhicule dit utilitaire, en réalité à hayon. Il faut donc trouver des trésors d’ingéniosité pour aboutir à concevoir un véhicule tri-corps dans un tout petit gabarit tout en reprenant une base existante.
C’est alors que Flaminio Bertoni, génial créateur des 2cv, Traction et DS, propose d’inverser la lunette arrière pour offrir aux passagers arrières une descente de toit qui leur permettent de ne plus baisser la tête pour s’asseoir dans la voiture. Ce choix impose une carrosserie atypique en forme de Z qui, si elle offre l’avantage d’une excellente accessibilité et évite à la neige de s’accumuler, est plutôt difficile à porter. Mais cette lunette arrière si étrange n’était pas la seule innovation stylistique de ce projet AM puisque celui-ci propose un avant très particulier composé d’un capot plongeant et d’optiques carrées chromées qui lui a valu le terme, peu glorieux, de crapaud.
Basé sur la plateforme de la 2CV, le projet AM ne peut en reprendre le moteur car le poids de sa carrosserie est trop important. Aussi, les ingénieurs de Citroën décident de modifier le moteur en augmentant sa cylindrée à 602 cm³, ceci afin de rester dans la classe fiscale des véhicules 3CV. Avec une puissance de 22cv, le moteur permet une vitesse de pointe de 110 km/h ce qui, à l’époque, était une bonne performance. De la 2Cv, la future AMI6 reprend également les quatre freins à tambour avec un diamètre de 220mm pour les freins avant soit légèrement plus grands que ceux de la deuche. Enfin, la suspension reprend le principe inauguré par la 2 Cv avec des ressorts horizontaux latéraux comprimés grâce à un système de liaison aux roues par tirants. L'amortissement est assurée par quatre frotteurs. Les quatre roues travaillent indépendamment. Un batteur à inertie (ou stabilisateurs à masse) est présent sur chaque roue et un système d'interaction élastique entre la suspension avant et arrière complète le système.
L’AMI 6 est présentée le 26 avril 1961 dans la ville d’Amsterdam aux Pays Bas. L’orogine de son nom est multiple : Certains indiquent que Citroën a accolé le chiffre 6 en référence à la motorisation devenant formant AM SIX puis AMICI soit AMI en Italien. D’autres font état d’un nom plus banal qui signifie Automobile de MIlieu de gamme. L’AMI6 reprend le meilleur de la 2cv à savoir sa rusticité et sa robustesse qu’elle associe au meilleur de la DS grâce à sa finition plus soignée et au volant monobranche, sièges moelleux ou encore poignées de portes et de commandes. D’abord fabriquée dans l’usine Panhard d’Ivry sur Seine, la Citroën AMI6 va inaugurer la toute dernière usine de la marque située à Rennes la Janais laquelle fabrique, aujourd’hui, le C5 Aircross. Si la voiture séduit par son confort et son habitabilité, elle peine à convaincre les clients avec son style particulier, surtout comparé à ses concurrentes bien plus pratiques. Si les premiers mois sont encourageants, la demande baisse dès 1963 et oblige Citroën à réagir.
En juin 1963, les frotteurs sont remplacés par quatre amortisseurs hydrauliques télescopiques qui ne nécessitent plus de réglages périodiques. Ce système à quadruple effet (ressorts, amortisseurs, batteurs et interaction élastique Av/Ar) atteindra un niveau de suspension particulièrement performant qui sera complété sur l'Ami 8 par l'ajout d'une barre anti-dévers avant limitant l'effet de roulis dans les courbes.
L’AMI6 fait le break
Malgré son désamour pour les breaks, perçus comme des véhicules utilitaires, Pierre Bercot doit se résoudre à proposer un break sur l’AMI6 qui se révèle moins pratique que ses concurrentes de par sa lunette arrière inversée qui interdit toute notion de polyvalence d’usage. Ainsi, le break AMI 6 fera son apparition dès le salon de Paris de 1964 en reprenant un dessin d’Heuliez qui avait dessiné et conçu un break sur la base de l’AMI6 dès le mois d’août 1962. Le break, nettement plus classique sur le plan du style, se montre également bien plus pratique grâce à son hayon et à son volume de coffre en hausse. Et Citroën va être ravi des chiffres de ventes du break AMI6 qui sauve carrément la carrière de la voiture. Bien aidé par une concurrence moins forte, le break représente déjà 2/3 des ventes d’AMI6 dès 1965 lui permettant même de devenir la voiture la plus vendue en France en 1966.
Une carrière courte mais en continuel développement
C’est aussi en 1966 que Citroën passe l’équipement électrique de l’AMI6 en 12 volts au lieu de 6 précédemment, permettant l’installation d’un alternateur en lieu et place de la dynamo.
En 1967, Citroën fait évoluer La face avant qui intègre des doubles optiques ronds et une calandre à barrettes horizontales. Les roues se parent d’enjoliveurs Gala identiques à ceux de la 2cv AZAM Export. A l’intérieur, la sellerie est spécifique tandis que le coffre est garni des moquettes. Ces modifications sont réservés aux breaks et équiperont la berline un an plus tard.
Début 1968, les feux arrière sont redessinés, deviennent multifonction et regroupés sur un bloc de forme trapézoïdale qui sera, par la suite, sur les 2cv 4 et 2cv 6. En mai 1968, le moteur évolue et passe de 22ch à 28 ce qui marquera l’ultime évolution technique de l’AMI6 avant son remplacement par l’AMI8.
La Citroën AMI6 berline quitte la scène en 1969 à l’occasion de la commercialisation de l’AMI 8 tandis que le break continue sa carrière en attendant l’arrivée du break AMI8. Sur les huit ans de carrière du modèle, la production s’élèvera à 1 039 384 exemplaires dont 555 398 breaks et 483 986 berlines, chose assez rare pour être soulignée, le break s’est donc davantage vendu que la berline sur une période plus courte de seulement quatre ans, c’est dire si Citroën a eu le nez creux en sortant ce dérivé.